La Rhizotomie dorsale non invasive est une intervention lourde. Elle vise à réduire la spasticité des muscles en limitant les reflexes automatiques, résultants d’un problème neurologique.
La spasticité est l’une des conséquences désastreuses de la paralysie cérébrale. Elle est responsable de la raideur des muscles et des déformations osseuses orthopédiques souvent très douloureuses qui provoquent des opérations orthopédiques lourdes et qui annihilent toute possibilité de progression motrice de l’enfant.
2. Les différentes approches
Cette intervention est pratiquée en Allemagne à Bonn et à Berlin (par un élève du Prof. Haberl) mais depuis plus longtemps aux Etats-Unis notamment par le Dr T.S. Park – qui a entrainé Prof. Haberl – du Children’s Hospital à St Louis (Missouri, USA). C’est ce dernier qui a mis au point cette technique non invasive. Il a opéré près de 3000 enfants depuis 15 ans. C’est ce médecin qui a le plus de recul et d’expérience concernant la SDR.
Aux US et en Allemagne cette intervention est pratiquée dès le plus jeune âge de l’enfant avant l’apparition des déformations orthopédiques et dès que l’enfant arrive à un certain niveau moteur : marcher seul ou avec une assistance technique. Dans cette optique l’intervention a pour but de libérer l’enfant de la spasticité pour lui permettre de progresser .
L’indication classique a pour but d’améliorer la faculté de marche.
Actuellement une extension de l’indication vers des enfants plus handicapés est en discussion.
Cette intervention existe en France où elle est apparue dès les années 60… mais bizarrement a été presque abandonnée. Mais l’optique serait complètement différente : l’opération est avant tout utilisée en soin palliatif, pratiquée sur des jeunes adultes pour lesquels les médecins se retrouvent dans une impasse thérapeutique, devant des déformations douloureuses contre lesquelles il n’y plus de solution. Les neurochirurgiens Français ne visent donc pas l’acquisition de la marche mais un meilleur confort… Cependant cette position serait en train de changer…
3.Comment se passe cette intervention ?
Le Professeur Haberl nous a expliqué le déroulement de l’intervention qui n’est pas une petite opération, elle dure 4h30 ! 4h30 sur le billard ! Une semaine d’hospitalisation et 6 à 9 semaines de rééducation très intensive, un an de rééducation intense qu’il faut préparer en amont…
Cette opération consiste à ouvrir la colonne vertébrale, là où passent toutes nos informations entre cerveau et muscles sur 7 cm au niveau des lombaires. L’intervention est dite non invasive car le chirurgien n’ouvre la colonne qu’à un seul endroit pour éviter tout risque de scoliose ou de fragilisation de la colonne.
Le chirurgien coupe alors plusieurs épines dorsales puis la dure-mère ( gaine ) et l’arachnoïde de la moelle épinière , il arrive alors sur les fibres nerveuses sensitives et motrices. Il isole les fibres sensitives soigneusement. C’est une étape très importante car en cas de sectionnement par erreur de fibres motrices, plus question de pouvoir marcher !!
Une fois les fibres nerveuses sensitives isolées, le chirurgien va tester les 8 racines de chacune de ces fibres pour sectionner les plus atteintes. En effet, le chirurgien ne sectionne pas toutes les fibres bien sûr mais seulement 50 à 70 % d’entre elles. C’est pourquoi elle est dite sélective.
Une fois le travail terminé, le neurochirurgien referme la dure-mère avec une double suture pour éviter les fuites de liquide céphalorachidien puis il met l’analgésie par voie péridurale, replace les épines dorsales avec une plaque en titane et des vis.
Là encore il y a une différence entre la méthode allemande et la méthode américaine car le docteur Park ne remet pas les épines dorsales en place (sans complications ultérieures apparemment), le professeur Haberl, lui, estime que le fait de couper les tendons du rachis et de ne pas remettre les épines dorsales engendrent des risques d’instabilité de la colonne ou des scolioses.
Après, il referme la peau avec un gel/colle de suture.
Les fibres nerveuses sensitives sont manipulées sous microscopes. Elles sont testées grâce à un EMG .
L’EMG ou Electromyogramme est un appareil qui permet d’enregistrer et d’analyser la conduction de l’influx nerveux dans certains nerfs jusqu’à un muscle. Cette analyse porte sur les nerfs moteurs, sur les nerfs sensitifs et sur les muscles.
Le professeur a insisté sur le fait que la SDR n’est qu’une réduction de la spasticité et non une élimination complète.
Pour que l’intervention soit utile, le professeur a insisté sur la nécessité de faire après l’intervention 6 à 9 semaines de rééducation intensive. En Allemagne les enfants sont pris en charge dans des centres, ce qui n’est pas le cas pour les enfants Français. Il faut donc organiser et préparer cette rééducation très sérieusement, en se rendant dans des centres de rééducation globale en Allemagne, en Pologne… Le professeur s’est dit très impressionné par la méthode Médek qui avait permis à certains de ses patients Français de récupérer et même de progresser au delà de ses espérances… Une intensive et un suivi Médek après l’opération seraient donc fortement conseillés !
4. Pour quels enfants ?
Pour le professeur, cette opération obtient de bons résultats pour les enfants paralysés cérébraux. Mais les enfants doivent avoir atteints un certain niveau moteur pour pouvoir après l’opération se rétablir et progresser.
Un bon candidat à l’opération doit pouvoir marcher seul ou avec une aide technique c’est à dire classé en GMFCS niveau 2 ou 3 à partir de 2 ans et demi et après le plus tôt possible.
Niveau I : Marche sans restriction de mouvements
Niveau II : Marche avec restriction de mouvements
Niveau III : Marche avec aide technique à la marche
Niveau IV : Mobilité autonome avec restriction des mouvements ; peut utiliser une aide motorisée. Niveau V : Déplacement en fauteuil roulant manuel, poussé par un adulte.
Il a pourtant apporté certaines nuances : pour lui, tous les enfants IMC pourraient en bénéficier. Une expansion de l’indication est en discussion, mais pour le moment, il préfère cibler les patients qui auront les meilleurs résultats pour donner toutes les chances à cette intervention de pouvoir être reconnue dans les autres pays européens et notamment en France.
En revanche la SDR ne peut rien contre une dystonie importante, des déformations osseuses. Une épilepsie non contrôlée, et des rétractions musculaires fixées sont des contre indications.
Pour les enfants « limites » sur le plan moteur, il existe un bon test : le botox. Si l’injection de botox fonctionne, la SDR donnera les mêmes résultats.
L’intervention se décide au cas par cas. Le dossier médical est envoyé à l’équipe avec une vidéo de l’enfant. Si il y a lieu, les parents et l’enfant sont convoqués pour une consultation pluridisciplinaire à Bonn, à l’issue de laquelle la décision est prise.
5. Un coût important
En Allemagne il faut compter pour l’opération, l’hospitalisation d’une semaine et dans certains cas des attelles, entre 20 et 25000 €. Vraiment ? D’après mon information l’opération est à 15-20000 Euro. Les atelles sont assez chères (5000 Euros) La sécurité sociale refuse pour le moment de rembourser cette intervention dans le cadre de la loi de l’Union Européenne car elle prétend que l’opération française est la même ce qui n’est évidemment le cas ni par la technique utilisée puisqu’elle n’est pas non invasive ni par les patients visés.
Aux Etats-Unis, la facture s’envole : il faut compter près de 50000 euros sans espoir de se faire rembourser un jour !
En 2022 le chirurgien qui a opéré Maxime en 2019 opère en France sur Paris et sur Nice.